Littératie contre désinformation
S’il est aujourd’hui un premier enseignement de la pandémie de la Covid-19, c’est bien celui de la spirale morbide de la désinformation au cours des premiers mois de la propagation du virus, la transformant en pandémie de la peur. Il s’est agi en grande partie de ce que l’OMS a désigné comme l’infodémie, c’est-à-dire la diffusion rapide d’informations trompeuses sur la santé particulièrement à travers les médias sociaux.
À cet égard, comme nous le rappelle le Comité international de bioéthique de l’Unesco[1], l’éthique du langage nous conduit à discerner la non-information, la mésinformation (fausse ou trompeuse mais non intentionnelle), la désinformation (fausse ou trompeuse, intentionnelle et délétère), la mal-information (vraie, rendant publique ce qui relève de l’ordre privé, à des fins intentionnellement délétères). C’est essentiellement une « pandémie de la désinformation » qui a entretenu la peur et le doute dont les conséquences immédiates furent celles de comportements amplifiant à leur tour la propagation du virus SARS-Cov-2. De tels comportements sont générés par la perte de confiance en la science, indûment qualifiée sur les réseaux sociaux et dans les médias de masse.
La spirale de la peur nourrie par la désinformation accroît la vulnérabilité du corps social, particulièrement la santé mentale des plus fragiles mais aussi celle de nombre de leurs aidants et soignants. Elle porte atteinte aussi à l’intégrité de la recherche et de l’environnement. L’atteinte à l’intégrité de la recherche a pu se produire par une sur-publication scientifique fragilisant en amont la validation éthique et scientifique de protocoles de recherche par des procédures d’examen accéléré. L’environnement a fait l’objet d’un impact négatif sur des programmes de soins, d’éducation et de prévention du fait d’une réaffectation des ressources parfois disproportionnée vers des activités spécifiques liées au virus et à la Covid-19. Au-delà de cet environnement immédiat, un autre cercle vicieux est celui du risque de pandémie et de la perte de biodiversité par une proximité accrue de l’homme et de la faune sauvage, détournée dans certains pays, à des fins alimentaires, cosmétologiques et de thérapies diverses.
La littératie est un moyen efficace pour lutter contre la désinformation et plus précisément contre « la désinfodémie ».
La littératie est une aptitude à lire, à comprendre, à communiquer et à échanger. Cette capacité à trouver et à intégrer l’information sur la santé est un enjeu majeur de santé publique. Il en est de même d’intégrer que l’incertitude est le premier maillon de la chaîne de la connaissance et qu’elle est donc inhérente à l’information sur la santé.
La littératie permet de mieux s’autonomiser et de mieux adhérer à des recommandations individuelles et collectives. Elle permet aussi de participer à la diffusion de la vérité scientifique, du bouche-à-oreille jusqu’au débat public, inversant ainsi la spirale de la désinformation.
L’éthique du langage donnant le même sens aux mots, fonde la littératie dans la relation « soignant(e)-soigné(e) », l’inter-disciplinarité de la recherche, du sanitaire et du social ainsi que dans la gouvernance d’une pandémie[2]. La littératie est une force contributive à l’égalité d’accès à l’éducation, à la santé et à l’inclusion sociale.
[1] CIB UNESCO, 6 septembre 2023 : Projet de rapport du Comité International de Bioéthique (CIB) sur la pandémie de Covid-19 : enseignements tires et recommandations pour les orientations futures - UNESCO Bibliothèque Numérique
[2] En janvier 2023, le CDBIO du Conseil de l'Europe a publié un guide sur la littératie en santé, en version anglaise et française : https://www.coe.int/fr/web/bioethics/guide-to-health-literacy
Jacques Montagut
Jacques Montagut s'investit pour faire connaître et reconnaître la médecine et la biologie de la reproduction ainsi que les questions éthiques soulevées par l’avancée de la connaissance dans ce domaine. Il a siégé dans différentes instances ministérielles et éthiques. Il décide aujourd’hui de favoriser la réflexion et le débat sur le site Internet de Fertile Vision.
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